Sunday, October 5, 2014

Quid le langage de la médecine ? (1) Un langage savant !

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 Et pourquoi donc savant ?

Parce qu’il s’agit d’un langage très ancien, à la grande différence de nombreux autres langages techniques (à l’exception de celui de la loi), construit de toute pièces, à partir du latin et du grec.

 Le mot « médecine » vient du latin « medicus » qui signifie « qui guérit”. Toutes les civilisations du monde (Indienne, du Moyen et de l’Extrême Orient et d’Europe) possèdent d’anciens systèmes codifiés de pratique médicale, dont on retrouve les traces écrites. Certains de ces anciens systèmes, tels que la médecine Ayuverdique aux Indes et celle de la Chine traditionnelle, sont du reste toujours pratiqués avec divers degrés d’autonomie et d’intégration par rapport à la médecine moderne (c-à-d occidentale et pharmaceutique).

 La médecine d’Europe et d’Amérique (du nord) remonte à la civilisation grecque (500 à 30 ans avant JC), en passant ensuite par la civilisation de l’Empire romain (100 ans avant JC à 400 ans après JC) et celle de l’Europe médiévale (de 1200 à 1500 après JC).  Donc, une histoire longue de 2000 ans qui forme les bases du langage médical d’aujourd’hui, en Europe et aux USA.

 De ses origines antiques, le langage médical conserve ses racines, préfixes et suffixes issus directement du latin et du grec, qu’il compose très systématiquement dans le but de décrire le corps dans tous ses détails, son fonctionnement ou son dysfonctionnement.

 Les préfixes sont des structures au début d’un mot qui modifient le radical. Par exemple le préfixe « hypo- » (issu du grec « ὑπό ») signifie en dessous, ou insuffisance, alors que le préfixe « hyper -» (son contraire, issu du grec  «υπέρ ») signifie en dessus, ou excès. Lorsque combinés  au terme « tension », ces deux préfixes  fournissent les termes « hypertension » et « hypotension » qui signifient respectivement « tension élevée » et « tension basse ». Idem pour le terme « glycémie » mentionné dans un billet précédent, où on obtient « hyperglycémie » et « hypoglycémie » pour signifier respectivement « taux de sucre trop élevé dans le sang » (hyper-) et « taux de sucre trop faible dans le sang » (hypo-).  
 
À noter par ailleurs, d’après ces deux derniers exemples concernant le taux du sucre dans le sang, que les préfixes issus du grec ou du latin apportent aussi précision et concision, c-à-d une économie des mots sans sacrifice du sens, et très utile en situation d’urgence.

En traduction médicale, on se penchera ainsi sur les très nombreux préfixes issus du latin et du grec (par ex. anti-, auto-, dys-, inter-, intra-, péri-, endo-, etc…), pour en reconnaitre immédiatement la signification, et ainsi faciliter la compréhension des termes qui se composent par leur intermédiaire, dans un texte médical. 

 Les suffixes sont des structures en fin de mot qui modifient le radical ou la racine du mot. Tout le monde connait par exemple  les suffixes « -logie », «  et « -logue » l’un et l’autre issus du mot latin « –logia » et du  grec « -λογία » qui signifie « dire », et avec lesquels on forme la science ou l’étude scientifique d’un domaine, comme par exemple les mots « dermatologie et dermatologue » ou « neurologie et neurologue », voire «radiologie et radiologue ».

 Ici aussi, en traduction médicale, on cherchera à repérer  les très nombreux suffixes latins ou grecs (par ex. –manie, -spasme, -sténose,  -plastie, -algie, -hypoxie, -ectomie, etc..)  et à connaitre leur signification, dans le but de faciliter la compréhension des termes additionnés d’un suffixe dans un texte médical.

 Le radical ou la racine du mot se compose avec un préfixe et/ou un suffixe qui s’y rattache. On connait en général la conjugaison des verbes français. On y parle toujours de la racine du verbe et de ses terminaisons,  à tous les temps et à tous les modes. En dehors de la conjugaison des verbes  de notre quotidien,  le langage de la médecine se compose de mots qui foisonnent  de racines latines et grecques qu’on repèrera dans leur relation aux suffixes et préfixes, et dont on apprendra à connaitre le sens, toujours aux fins de faciliter la lecture et la compréhension d’un texte médical.  

 On fera ainsi circuler des listes où figureront des radicaux tels que: myo-, phrén/o- , osté/o, hépat/o, mamm/o, phlébo- , etc.. dont on élucidera le sens pour ensuite les composer avec divers préfixes et suffixes semblables à ceux mentionnés ci-dessus. Et à l’inverse, on fera aussi circuler des listes de mots à décomposer (par ex. une liste des branches et spécialisations de la médecine) pour en extraire les parties radical, préfixe et/ou suffixe, et le sens qui s’y trouve véhiculé.

 En composant et décomposant ainsi les mots du langage de la médecine à partir de leur racines, préfixes et suffixes, dont on apprend la signification, on se familiarise avec le fonctionnement et les sens de ce langage, ses rouages, ses origines, et tout le système référentiel qui lui donne des signifiants.

 L’initiation à la formation des mots du langage médical offre accès au mystère de ces mots –dits savants,  très longs,  d’apparence compliquée ou parfois très semblables. Par exemple, lorsqu’on comprend comment marche cet agencement des racines, préfixes et suffixes, les mots suivants se déchiffrent et se distinguent immédiatement et très facilement : laryngoplastie, laryngoplégie, laryngoscope, laryngoscopie, laryngospasme, laryngosténose, laryngostomie et larygotomie.  Et par la même occasion on apprend la précision et l’économie de ce discours, qui parait parfois si revêche.

 Mais ce n’est pas tout !  Il y a encore d’autres aspects du langage médical que nous étudions, et qui s’imposent à sa caractérisation; en occurrence les synonymes,  les acronymes et les abréviations  qui feront l’objet d’autres billets ultérieurs.

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